2014 Bonne Santé

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                                                    2014 BONNE SANTE



Chaque année, début novembre, je reçois de la municipalité une invitation pour la « réception des aînés »(des vieux, en somme).

Mon épouse, à chaque fois, me dit la même chose :«  Tu devrais y aller, tu ferais des connaissances, ça te sortirait... »

Et je lui rétorque immanquablement la même réponse:

« Quand la municipalité m'invitera pour faire parti du comité de sélection de la miss du village : OK »

Je n'aime pas les vieux !

Vous discutez avec des « jeunes », ils vous parlent de leurs études, de leurs envies, de leur futur travail, de leurs voyages, de leurs copains ou copines, de leurs

chanteurs ...

Vous discutez avec « un vieux », il vous parle de son diabète, de son cholestérol de son hypertension, de ses rhumatismes... j'en passe et des meilleurs.

Et à chaque fois je lui dis : « Si je raconte ma vie...on y passe la nuit ! »

Car, je pourrais être un cas d'école. oh ! sans gloire, avec beaucoup de souffrance.

Je me fais un malin plaisir à faire le vieux et à savourer par avance le récit de mes maladies...

Accrochez-vous !

Tout jeune « bébé » ma mère me tient dans ses bras dans le jardin de ma grand mère, rue « Jules Guesde » quand les anglais bombardent la gare de LENS le 16 juin 1944.

Elle voyait les bombes tomber au dessus de sa tête pour finir sur la gare.

Pris de panique, elle m'écrasait dans ses bras, et je ne dus mon salut qu'à la présence d'esprit de ma grand mère qui lui mit une paire de gifles et m'arracha de

l'étreinte.

Puis, à dix huit mois, je me suis mis à tousser pour ma coqueluche.

A quatre ans, on découvre que j'ai une décalcification des os.

On me donne comme traitement des séances de rayons ultraviolets.

Mon père demande alors à travailler au poste du matin, pour pouvoir me conduire deux fois par semaine au centre médical route de Béthune à Lens.

Il venait me chercher l'après midi à l'école, et nous partions tous les deux sur son vélo. Il avait posé sur le cadre une petite selle et deux repose-pieds sur la fourche

avant.

Je sens encore son souffle dans mon cou, quand il fallait grimper, au retour, la côte pour arriver au carrefour « Plumecocq ».

Ces visites ,chaque fois plus longue ( de 5 mn à 45 mn),avaient toujours le même rituel : tout nu sur un lit de mousse, sur le ventre, sur le dos, une paire de lunettes de

plongée, et une minuterie qui n'avançait pas...

A partir de quinze minutes, les retours à la maison s'annoncèrent plus délicats.

Je brûlais, je pelais...et le talc n'avait qu'un effet « placebo ».

Mais, j'étais bronzé... plutôt rouge fraise!

A cinq ans, ma mère m'emmèna voir une cousine Valentine L., encore rue Jules Guesde, près de la barrière du seize.

Elle habitait un baraquement avec sa famille. Elle avait seize enfants , sans compter les fausses couches...

En arrivant, et après les nombreux baisers, ma mère dit à Valentine : «  Tu as un enfant derrière la cuisinière ! »

« -Oui, il a toujours froid et y veut plus sortir !!! »

Il mourra de tuberculose quelques mois plus tard...en me refilant sa maladie.

Un autre de ses enfants, lui aussi atteint, ira à Helfaut , et s'en sortira.

Ma grand mère décida que la famille s'occuperait seule de mes taches au poumon.

Régime, régime, Régime...

1949 ...viande midi et soir.

Chaque mercredi j'avais droit à un steak haché de cheval arrosé d'une louche de soupe au lard bouillante pour toute cuisson.

Mais, chaque jour, à midi, avant le repas, un jaune d’œuf battu dans un verre de vin Monbazillac devait me remonter.

Je repartais à l'école à demi ivre.

J'ai dû manquer très peu l'école...et contaminer quelques copains !

A six ans, le Docteur B du trois de Lens avait beau me gratter la plante des pieds avec une plume d'écolier, je ne ressentais rien : j'avais une méningite.

Régime, régime, régime...

cette fois, à base de poisson, bon pour le cerveau suivant la coutume.

Chez ma tante, les soles et les carrelets , chez ma grand mère le cabillaud, et à la maison les harengs et les maquereaux ...l'horreur !

Six mois durant, je ne mangeais que du poisson, je ne sentais que du poisson, je vivais avec du poisson.


Puis commença la série des bronchites, des congestions.

Chaque année, l'une et l'autre.

Je vous fais grâce des « enveloppements » et des cataplasmes qui rythmèrent ces hivers.


                                               Fichier:cataplasme.jpg  cataplasme à la farine de moutarde


Tous ces « régimes » avaient fini par me détraquer le foie.

Un jour, mon père fut convoquer par mon instituteur pour lui signaler que j'avais vomi une dizaine de fois dans l'après midi.

J'avais laissé la classe, les escaliers, la salle de sport, la cour et les WC dans un triste état.


                                               Fichier:1953_photo_classe_.jpg école du 3 de Lens 1953


Comme d'habitude, on trouva la solution.

Ce problème, arriva aux oreilles de notre marchand de beurre ambulant ce qui amena celui-ci à proposer ses services.

Il était radiesthésiste et annonça venir la semaine suivante avec son pendule.


                                                    Fichier:pendule.jpg


Je me retrouvai donc debout entre ses jambes avec un « truc » à ficelle qui voyageait de droite à gauche devant mon estomac.

Le résultat ne se fit pas attendre : je relâchai une puissante et continue gerbe de vomi à plus de deux mètres.

Ma mère fondit en excuses, mais ce n'était que flatter le savoir-faire de notre guérisseur.

« - Voilà, c'est fait, j'ai « purgé sa bile !? »

Quelques grippes, comme de tout à chacun, et pour mes dix huit ans commença ma lucite polymorphe.

Maladie incurable qui vous éloigne définitivement du soleil.

Un séjour au CHU de Lille calculera le temps que je mets pour le premier coup de soleil : 7 secondes ! Qui dit mieux ?

Imaginez qu'en ouvrant vos volets le matin, vous seriez déjà brûlé.

Maintenant commence le meilleur.

1962-1990 : huit pneumonies : Une tous les 3 ou 4 ans !

Sachant que la pneumonie est la première cause de décès aux USA, on peut s'inquiéter.

La dernière mérite qu'on s'y attarde.

Ce matin là, mes élèves venaient de prendre place, et la porte de communication entre les classes s'ouvrit pour laisser entrer ma collègue qui m'apportait la fiche qui

comptabilisait les demi-pensionnaires.

Fait inhabituel, car d'habitude c'était un élève de service qui s'en chargeait.

Ma collègue me regarda et me dit : « -ça va, vous avez l'air tout drôle. Vous avez encore fait la fête hier ? »

Et elle me mit la main sur le front... « Mais vous brûlez, vous êtes malade ? Il faut rentrer chez vous, on va s'occuper de vos élèves... »

« Oui, c'est vrai, je vois ma classe qui balance sans arrêt. »

Ce geste inhabituel de ma collègue m'avait peut-être sauvé la vie.

Je rangeai mon cartable, je signalai mon départ à la directrice et je rentrai.

Je téléphonai à mon médecin qui s'étonna de mon coup de fil. Il m'avait aperçu de loin le matin...j'avais sa fille en classe.

« -J'arrive me dit-il »

9h15, il m’ausculte, me regarde et dit :

« -Il va falloir faire des radios » .

Puis se retournant, il aperçoit mon téléphone, le décroche et appelle le cabinet radiologique rue Lamendin.

« -10h ? c'est parfait ! »

Il m' avait obtenu un rendez-vous en moins de 30 mn.

10h15, mes radios terminées, le radiologue me prend dans son bureau pour me dire de voir un spécialiste.

Lui aussi, à son tour, décroche son téléphone et me prend un rendez-vous chez le docteur D à Lens.

« -Pour 11 h, un signe de tête, c'est bon, je vous l'envoie".

Je rentrai chez moi, et retrouvai mon épouse qui n'avait que 2 heures de cours ce jour là et qui s'étonna de me voir rentrer du radiologue.

J'étais comptant de la voir, car la conduite de ma voiture devenait de plus en plus délicate.

Elle me conduira donc pour 11h route de Béthune.

« - On va refaire les radios pour confirmation. »

11h 15 « -Bon, je vous attends au CHU de Lens à midi ».

J'avoue que tous ces événements successifs ne m'avaient pas vraiment alerté.

Je vivais dans un brouillard qui s'épaississait.

12 h, Le docteur D. vint me chercher dans la salle d'attente et me conduisit dans un petit cabinet où je fus rejoint par un chirurgien tout de vert vêtu, le masque sous le

menton.

« -Ouvrez la bouche, tirez la langue. »

Il me pulvérisa un produit et me dit de patienter quelques minutes durant l'anesthésie.

Le docteur D. me proposa alors de le suivre dans une salle et me fit asseoir les bras croisés sur une grande table de bois.

Il demanda à deux de ses collègues de le rejoindre par les communications intérieures.

Ils étaient trois devant moi et une infirmière qui préparait l'intervention.

Il me bloqua la bouche grande ouverte avec une cale.

Un petit tube commença alors à s'enfoncer dans ma gorge, puis... plus rien, l'anesthésie avait fait son effet.

Le tube s'enfonçait. D'un coup d’œil dans l’œilleton, le docteur D. guidait la descente.

C'est alors que l'infirmière adapta une bouteille de sérum physiologique.

Elle tourna le robinet et ...rien, je ne ressentais rien.

Le liquide s'écoulait, devait me noyer, et je ne ressentais rien !

Savoir que l'on a 1 litre de liquide dans les poumons laisse une interrogation .

Est-ce pareil quand on se noie?

Puis le liquide fut aspiré avec tout un monde coloré et grouillant. Je retrouvais ma voix mais pas la parole.

Le docteur D. m'annonça alors : « Vous n'avez pas de cancer, vous avez une bonne pneumonie et on vient de vous « laver » , « nettoyer » votre poumon.

Il faudra vous faire vacciner …

Votre médecin ne pouvait rien entendre, vous aviez un lobe de poumon bloqué...»

Cinquante ans, je testerai l'opération des hernies en micro chirurgie à l'hôpital de Bully les Mines.

Rentré le lundi, j'en ressortis le vendredi avec 3 points de suture et une feuille de plastique dans le ventre.

Vous comprenez mieux maintenant qu'entendre dire par la petite vieille du coin :

« Demandez à votre docteur les pilules Machin, elles sont meilleures que les Truc pour les varices » me laisse une envie de lui marcher sur les pieds pour l'entendre

crier !!!

Si vous me demandez des nouvelles de ma santé, je vous dirais : «  18 de tension, je m'inquiéterai quand elle fera zéro ! »


Allez...BONNE SANTE... BONNE ANNEE...

2015, maintenant je pourrais vous rajouter l'arthrose !

À suivre