L'histoire par le trou de la serrure : quand le bâtiment va...tout va !

De Wikicitoyenlievin.

                                                   1973 Quand le bâtiment va tout va
Episode n° 1 : achat du terrain


Tous nos amis achetaient une maison dans les lotissements qui se construisaient dans Liévin et les villes avoisinantes.

L'inflation était de 13% et les prêts à taux constant devenaient vite une aubaine.

Venant des cités, je désirais une maison individuelle.

Il fallut se mettre à la recherche d'un terrain.

Originaire de la rue Dernoncourt (Fabre d'Eglantine), mon épouse aurait aimé y retourner.

Le coin était considéré comme insalubre et triste à cause de la Souchez qui inondait parfois la rue et son terril qui fermait l'horizon.

Le prix devrait être plus attractif.

Mais je sentais le vent tourner avec la fermeture des mines et les besoins en terre rouge des crassiers pour tracer de nouvelles rues.

Notre terril sera appelé à disparaître et sera remplacé par un espace vert... Quelques années plus tard.

Un terrain à l'abandon envahi d'arbustes semblait attendre notre arrivée..



                                                    Fichier:terrain.jpg Le terrain après un premier nettoyage 


J'appris au service technique de la ville que ce terrain comportait trois parcelles: deux aux houillères et une à un habitant du sud d'Arras.

J'écrivis à ce Monsieur pour lui demander un rendez-vous un dimanche matin .

Je le rencontrai dans sa ferme au retour de la messe.

J' appris à ses deux grands fils que leur mère était la propriétaire. Elle avait apporté le terrain en dote pour son mariage... Ils l'avaient oublié !

Après l'apéro, la vente était conclue.


Episode n° 2 les fondations


Je ressortis ma planche à dessin et attaquai mes plans.

Une entreprise liévinoise accepta mes conditions : faire les quatre murs et poser la toiture...

Je ferai tout le reste !!!

Les travaux commencés en 1974 dureront 4 ans.

Chaque journée de travail , j'avais prévu de passer sur le chantier pour voir l'avancée des travaux.

Et cela commença fort !


                                                 Fichier:Fondations.jpg


Un jour d'octobre, seize heures, les fondations creusées, la toupie de béton entra sur le terrain et creva à quinze mètres des tranchées.

Il fallut vider la cuve sur place !

Le mélange s'étalait sur le sol et commençait sa prise.

Avec une brouette et une lampe de poche entre les dents, un ouvrier entama une course contre la montre.

Il termina à 22 heures éreinté mais satisfait d'avoir sauvé ses huit mètres cubes de béton.

Je l'admire encore.


Episode n° 3 Les murs


L'entreprise inséra 2 feuilles de papier bitumé entre la dalle et les murs.

Cette technique était supposée atténuer les affaissements miniers. J'avoue qu'aucun crépi ne subit de dégradations durant les quinze ans qui suivirent.

La maçonnerie montait maintenant à deux mètres cinquante.

Un soir, je ressens comme un étrange malaise ...

Les ouvriers sont partis et les coffrages pour le chaînage du rez de chaussée à moitié terminés.

Ma maison ne ressemblait pas au dessin et à l'idée que je m'en étais faite. Pourquoi ?

Je regardais à gauche, à droite, en tous sens sans trouver de réponse.

Je décidai de monter à l'échelle pour avoir une vue d'ensemble d'en haut.

Cette initiative fut instructive.

Les ouvriers avaient mis comme prévu 5 cm de laine de verre pour l'isolation entre le mur de vingt et la cloison de dix centimètres

mais seulement sur trente centimètres de large aux ouvertures des portes et fenêtres.

Le reste de la cloison était vide.

Du sol tout semblait parfait, mais ma maison n'était pas isolée.

Qu'était -il advenu de ma laine de verre ?

Ma colère grimpa d'un cran !

Je repasserai le lendemain matin pour une sérieuse explication .

Rentré chez moi, je tournais comme un lion en cage...

Je n'avais pas de réponses à mes interrogations...

21 heures, ma femme à mes côtés, mon plan sous le bras, une lampe de poche en main, nous retournons à la construction.

Nous vérifions les longueurs, les hauteurs, les largeurs des portes, les passages des tuyaux... !!!

Mon dieu, il manquait trois fenestrons sur un côté. Excusez du peu !

La salle de bain, les toilettes et la chaufferie étaient condamnées à l'obscurité...


                                                  Fichier:fenêtres.jpg Les 3 fenestrons ont été rajoutés !


Je comprenais enfin mes craintes de cette fin d'après midi.

Le lendemain, à huit heures, sans un mot, j'interdisais le travail dans l'attente du responsable de l'entreprise.

Tous me regardaient dubitatifs.

Ce matin ensoleillé s'est montré beaucoup plus orageux que ne l'annonçait la météo.



"Episode n° 4  Êtes-vous au courant ?"



Ma maison ressemblait davantage à une ruine qu'à une construction.

Aucune fenêtre, aucune porte n'interdisait son entrée.

De l'intérieur, en levant les yeux on apercevait les tuiles six mètres plus haut.

Je n'avais plus qu'à remonter mes manches.

En premier, je devais fermer les ouvertures.

Mais, poser seul une fenêtre d'un mètre quatre vingt à trois mètres du sol sur une échelle un jour de pluie et de vent, vous ramène sur terre.

N'avais- je pas été trop présomptueux ? Il était inutile de se lamenter. C'était mon choix.

La maison close (sic) j'allais demander un compteur électrique de chantier pour mes appareils.

Un ami travaillant à EDF accéléra la chose.

Vite, à l'entrée du terrain je dus monter deux piliers pour y mettre mes branchements à l'abri.


                                             Fichier:Garage.jpg  les 2 piliers et le garage, mais c'est la suite...


Trois ans plus tard, ayant eu d'autres soucis mais inquiet de ne pas recevoir de facture, je rendis visite à mes fournisseurs de courant.

« -Vous avez un branchement ?

-Qui vous l'a fait ?

-Depuis Quand ?

-Combien avez-vous consommé ?

-Avez-vous noté ses indications à son arrivée? »

Le problème se résumait simplement : le brave homme qui m'avait aidé était décédé sans rien noté...

J'étais un inconnu.

On se mit d'accord sur une statistique des deux prochains mois et l'on ferait la règle de trois de mes dettes sur un échéancier.

Je n'ai jamais consommé aussi peu que durant ces deux mois. Allez savoir pourquoi !



Episode n° 5     Le garage



Mes travaux avançaient lentement.

Nous avions décidé de rester sur place pour éviter les déplacements.

Quelques mètres carrés de plancher nous permettaient de dormir à l'étage en empruntant une échelle.

Mon bouc, ma chèvre et mon mouton occupaient la future salle de bain...

Je devais trouver un endroit pour les loger l'hiver.

Nous ferions le garage et des box avant de finir l'intérieur de la maison.

Une tante nous indiqua que deux jeunes voisins tâcherons se lançaient et recherchaient du travail .

Ils me donneraient un coup de main .

Ces deux gaillards costaux et leur aide faisaient des prodiges.

En trois jours, les fondations coulées, les murs atteignaient 1m50.

Le lundi, je ne les vis pas. Idem le mardi. Le mercredi j'allais aux nouvelles chez la tante.

« -Tu n'es pas au courant ?

Ils sont en prison .

Samedi soir, ils ont violé leur voisine de 80 ans ! »

Pour avoir rencontré leur gentille et fraîche épouse avec leur bébé, je me dis qu'il y à des jours où l'homme descend bien bas.

Je finirai le garage avec ma femme...

À suivre